filchaZ   scénariste & romancier

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Romans (quelques uns ...)

 

LES CHEVELUS ou pourquoi les Rolling Stones ne sont pas venus à Louvie-Soubiron en 1973 / 2025

Extrait :

1 - L’attaque des Dalton(eu)

(Ponpon, Colette, Pierrôt et Richard)

 

Avril 73, à l'arrière de la vieille Renault 6 beige, une des voitures les plus informe et la moins sexy des années 70 traînait presque par terre sur cette petite route cabossée et mal goudronnée qui montait en flemmardant à mi pente de cette montagne pyrénéenne dans le Haut-Ossau ...."I was born in a crossfire hurricane »....sa roue avant gauche, un pneu dégonflé usé, serti d’un lierre fleuri…

Eux à l'ntérieur ils s'en foutaient de leur bagnole un peu végétale qui se traînait comme une charrue, tractée par quelques chevaux vapeur poussifs, ils braillaient sur l'air des Stones qui passaient sur le vieil radio cassettes "..jumping jack flash it's a gas gas gas...Eux c'était Patrick Pontacq, dit Ponpon, qui conduisait, 27 ans, pas grand, le plus vieux, brun, cheveux longs frisés, teint mat, fine moustache et petite barbiche prolongeant un visage doux et lumineux de jeune apôtre, veste en peau retournée .. à côté, Santiags poussiéreuses sur le tableau de bord que Ponpon regardait, se retenant de faire une réflexion, il était cool, mais merde quand-même !..c’étaient les Santiags de Colette, 20 ans, jeans et blouson noir, cheveux courts devant et très longs derrière, plutôt jolie sous ses yeux cernés et sa mauvaise dentition ; une rockeuse ; la seule qui connaissait les paroles en anglais .."and I howled at the morning drivin’rain »...elle toussa et passa le joint derrière à Pierrôt, qui en le prenant fit tomber la cendre sur la cuisse de Colette qui râla... ;

— merdeUU ..PIERRÔÔÔT !!

— I apologize(eu) con ! S’excusa Pierrôt, 17 ans, cheveux longs châtain, allure un peu de Mick Jagger adolescent, la même coupe, la même tenue, un peu la bouche qu'il essayait de rendre lippue, et le même timbre en chantant ..."..jumping(eu) jack flash is a gasgas gasquot.. et puis Brian Jones, assis à sa gauche, droit sur le siège, un grand chien Berger des Pyrénées, allure de Bobteil, le poil long, blond caramel ; il avait soit-disant les yeux en amande de Brian Jones (le fondateur des Stones), ses yeux on ne les voyait pas, lui aussi avait les « cheveux » sur les yeux ..

— Bon ! Brian, toujours pas !?

Dit Pierrôt en gratouillant la tête de Brian Jones et en passant, par dessus, le joint à Richard assis de l’autre côté du grand berger des Pyrénées, Brian, placide, mâture lui. Richard, 17 ans, brun, gueule de jeune voyou, la même coupe que son idole Keith Richards, le célèbre guitariste des Rolling Stones, le même prénom-nom, c’était un signe ! Il fumait sa Camel en attendant que passât le joint, chassant la fumée et râlant.

 

— Putain on voit plus rien !..ouvrez les fenêtres(eu) !...c’est pas bon pour Brian ça,con ! Richard et Colette devant ouvrèrent grand leurs vitres. Pierrôt aussi.

La vieille R6 exhala dans le paysage d’un long nuage de fumée.

Ponpon baissait aussi sa vitre. Regard dans le rétro. Blême.

— Ah non pas eux ! Pas les Dalton(eu) !

La tête de Ponpon dans le rétro, c’était pas bon. Tout le monde se retourna, Brian aussi. A cent mère derrière tanguait en grinçant la méchante Ford Tonus grise toute rapiécée, des frères Castanet, dit les Dalton(eu). Par les vitres deux beaufs éructant à nuque épaisse et cheveux courts brandissant des gros ciseaux de tonte et hurlant des « HEY LES PELUTES,

ON VA SE LES TONDREU CES PUTAIN DE PELUTES ! » (pélute : chevelus)

Tension forte dans la vielle R6. Les Castanet (ou les Datlon) étaient des gros cons violents, gros beaufs, qui détestaient les chevelus, pour eux c’étaient que des gonzesses(eu). Ponpon accéléra, chacun, chacune se débarrassa de vannes traqueuses sur la tonte. La trouille montait alors que la guimbarde des Castanet grossissait dans le rétro,.. leurs braiements d’infâme beaufitude ! « TONDRE LES PELUTES !! TONDRE LES PELUTES ! La pauvre R6 devant accrochait mal la pente pyrénéenne, elle reprit un peu de terrain dans la descente qui suivit vers les Eaux-Bonnes. Brian Jones, le berger des Pyrénées, tremblait de tous ses membres, submergé par les phéromones d’odeur de peur que produisaient animalement ses amis, entre leur vannes tendues, du genre que ça leur ferait des économies de coiffeur(eu), que malgré leur brutalité, les Castanet prêtaient peut-être des blouses pour éviter les petits cheveux dans le cou ! Pierrôt et Richard caressaient Brian Jones pour le calmer, Brian n’était pas un chien de défense, plutôt un chien à défendre !

 — Popeye(eu) con !.. Popeye, là-bas !! Hurla Colette, montrant du doigt.

LE TUEUR AUX DEVINETTES polar humour noir

Extrait :

1

Ce qui surprend tout de suite chez ce jeune homme qui roule au pas dans cette Peugeot 309 démodée, ce qui surprend, ce sont ces deux grands yeux doux exorbités d’épagneul confiant, un étrange premier degré au monde, sans retenue. Grands yeux confiants qui mangent un visage poupin au crâne rasé, avec juste sur le haut du front une houppette de cheveu comme un point d’interrogation. Et puis son grand manteau noir qu’il semble ne jamais quitter, inapproprié à ce mois d'avril provençal.

Mais lui, Gus, n’est pas concerné par tout ça, par contre, la chanson de Boris Vian qui passe sur son antique radio cassette, là il s’implique et chante à tue-tête alors qu'il avance, allure de retraité, sur cette départementale de Haute Provence déserte au volant de cette grosse voiture bleu ciel un peu carrée, comme dessinée par un enfant, mais toute proprette, aimée de son propriétaire.  

- ... un frigidaire,

un joli scooter

un atomiseur

et du Dunlopillo,

une cuisiniiiiiiiière avec un four en verre ..

des tas de couverts

et des pelles à gâteaux.

Sur la banquette arrière, il y a assis un gros chat en peluche tout bleu, bleu mer profond. Son regard noyé.  

… une tourniqueeeeeette pour faire la vinaigreeeeeette,

un bel aérateur pour bouffer les odeurs  ....

Gus dépasse une imposante Audi dernier modèle, gris métallisé, garée sur le bas-côté de la route. Vingt mètres plus loin, un homme d’affaires en bras de chemise, jerrycan d’essence à la main. Il fait signe de s’arrêter avec un air catégorique, portable à l'oreille, conversation tendue. 

Gus sourit, s’arrête un peu plus loin, en regardant les rétros et en mettant le clignotant, tout bien comme il faut. Il fait marche arrière, coupe la radio et baisse la vitre, il est toute attention à la demande. L’homme d’affaires, un décisionnaire sexagénaire, un dos argenté, énervé d’être dans cette situation, bras de chemises et jerrycan. Il en voudrait presque un peu à Gus de dépendre ainsi de lui, de dépendre d’un marginal à qui le vigile de l’immeuble de sa société n’aurait même pas laissé franchir le hall. Il décolle juste son portable de l’oreille pour dire, presque ordonner :

       —   Vous pouvez m’emmener jusqu’à la prochaine station-service, il y en a une à trois ou quatre kilomètres de là ?

       —   Mettez le jerrycan dans le coffre ! indique  fort gentiment Gus avec sa voix d'enfant, comme pour aider ce décisionnaire à passer ce difficile moment vis-à-vis de lui-même. L’homme, toujours collé à son portable, fait quatre pas en arrière, ouvre le grand coffre tout vide tapissé de moquette et y jette négligemment son jerrycan. Referme d’un coup sec et s’installe à l’avant tout en continuant sa conversation sur son portable. Gus repart lentement, en mettant son clignotant re-bien comme il faut. Le dos argenté s’énerve toujours sur son portable.

        —  ... mais mais si ! Mais si !.... Ils vont finir par craquer, si on les laisse mariner assez longtemps ! Nous on a tout notre temps, eux pas ! Ensuite on leur concocte un pacte d’actionnaires bien ficelé, avec deux clauses qu’ils sont obligés d’accepter : une clause de prise de contrôle au bout de trois mois si le business plan n’est pas respecté, et là on sécurise, une clause de garantie sur les biens personnels en cas de faillite. En la jouant comme ça, aucun risque pour nous. Ils sont totalement coincés et on ramasse l’affaire pour 35, je te dis (plus bas) 35 ... si !

Une puissante Daccia rouge les double rageusement, un garçonnet à l’arrière leur fait des grimaces. Gus sourit à l'homme d'affaires à côté de lui qui écoute en soupirant ce que dit son collègue à l'autre bout.

       —  C’est bizarre, s'étonne Gus, tous ces gens qui se déplacent, comme s’ils étaient convaincus d’aller faire quelque chose de plus intéressant ailleurs !

       — Pas vous ? rétorque l’homme énervé, prenant conscience soudain de l’insupportable lenteur de leur véhicule. " Je te rappelle " Dit-il. 

Il coupe son portable, rageur.

       —  Non non, pas moi, répond gentiment Gus, moi je n’ai aucun but, hormis celui de me déplacer !

Il désigne du doigt la Dacia rouge qui disparaît et regarde l’homme d’affaires. Ses yeux calmes d'épagneul confiant.

      —  Vous voyez !  Vu l’heure, il est possible que Polo et Léontine et leur marmot aillent manger chez la belle-sœur et son mari. Ils y vont à vive allure au risque de se tuer. Là-bas ils engrangeront un lourd repas, interminable, qui forcera Paulo à déboutonner le bouton de son pantalon, ce qu’il n’aime pas faire et que Léontine n’aime pas voir. Ils parleront politique, mais surtout de la télé parce que c’est agréable de se sentir plus intelligent que sa télé. Le marmot, Théo, ou Barnabé, prendra une avoinée parce qu’il aura dépassé les limites. Trajet du retour, personne ne moufte, car déjà dans le souvenir, la mousse au chocolat se mélange lentement à tout ce qu’ils ont dit de paroles inutiles qu’ils connaissaient déjà, et ils baignent dans un vague dégoût d’eux-mêmes, avec juste l’envie d’être méchant ! ... Si si absolument ! 

L’homme est dérouté, et un peu admiratif, énervé de cette admiration, donc énervé tout court.

      —  Vous êtes écrivain ? interroge-t-il, genre flic. 

      —  Vous aimez les devinettes ? s’enthousiasme Gus.